Lundi matin, 8h10. Monsieur M., 82 ans, pose sa liste de médicaments sur la table. Elle provient de l’hôpital. Ma liste dans le système est différente, et le service d’aide et de soins à domicile signale que sa version diffère également. Trois listes, toutes bien intentionnées, mais contradictoires. Sa réaction : « J’ai pensé que je devais d’abord en discuter avec vous. » Très bonne idée, hormis le problème suivant : entre sa sortie de l’hôpital et aujourd’hui, il a renoncé à un nouvel anticoagulant, un médicament à mon avis essentiel pour lui.
Je respire profondément. Nous discutons de ses objectifs : moins de vertiges, moins de fatigue, pouvoir se lever à nouveau en toute sécurité. Nous parlons également de mes objectifs : réduire le risque d’une nouvelle embolie pulmonaire, favoriser la compréhension, avoir une vue d’ensemble. Nous passons la liste en revue comme un sac de voyage. Que devons-nous vraiment garder ? Que pouvons-nous laisser de côté ? Nous tombons sur des erreurs, des ordonnances périmées, un médicament sans indication – et sans cesse sur des ambiguïtés : « Pourquoi ai-je besoin de celui-là ? » – « Ah non, celui-là je ne le prends plus depuis longtemps. »
Nous décidons ensemble d’arrêter deux médicaments et d’en réduire un autre de moitié. J’enregistre les changements dans le système, je rédige une nouvelle ordonnance, informe la pharmacie et le service d’aide et de soins à domicile que cette liste est désormais valable et y joins le plan de médication électronique actualisé. Après le lui avoir également imprimé, je passe en revue chaque médicament de la liste avec lui. Bref instant de satisfaction. Jusqu’à ce que l’assistante médicale m’appelle : « Le médicament X est en rupture de stock. » La consultation se poursuit, tout comme le temps qui passe. On n’a jamais de temps à consacrer à ce type de discussion, mais cela en vaut la peine : moins d’effets secondaires, plus de compréhension, moins de questions, et souvent des coûts moins élevés. Et je suis content de ma journée, car la liste est à nouveau correcte ; du moins jusqu’à la prochaine visite chez le spécialiste ou la prochaine rupture de stock.
L’après-midi, lors d’une visite à domicile, une patiente me montre son pilulier hebdomadaire. Son fils l’a aidée, tout comme le service d’aide et de soins à domicile. Je suis toujours étonné par la bienveillance sur place. Nous discutons de la suppression progressive d’un somnifère. La peur de ne plus pouvoir dormir est palpable. Nous convenons d’un plan par petites étapes et d’un suivi téléphonique dans une semaine.
Ce qui me motive ? Quand la liste devient plus courte et plus compréhensible et que la vie paraît plus facile. Quand un patient dit : « Je me sens à nouveau plus alerte. » Ce qui me contrarie ? Que les interfaces soient encore trop souvent des points de rupture : hôpital, cabinet médical, pharmacie – trois systèmes, trois listes. Ce qu’il faudrait améliorer ? Des responsabilités claires pour l’ensemble des médicaments, un plan commun et actualisé ; et du temps rémunéré pour ce qui est vraiment efficace : la discussion et les échanges interprofessionnels.
Sur le chemin du retour, je pense à Monsieur M. et à son sac de voyage. En fin de compte, ce sont rarement de grandes actions qui comptent, mais plutôt de nombreuses petites étapes bien expliquées. Et le sentiment partagé : aujourd’hui, notre sac à tous les deux est bien moins lourd.